Un dépassement qui ne passe plus.

 

Vendredi 4 novembre 2022, à 9h10 et 55 secondes… Les femmes de ce pays commenceront à travailler gratuitement pour quasiment deux mois, jusqu’à la fin de l’année. Tout au long de cette période, pour un même niveau de responsabilités et de compétences, leurs collègues masculins, souvent au sein des mêmes organisations, continueront, eux, d’être rémunérés. À ceux qui auraient encore la tentation de détourner pudiquement le regard, voire cyniquement de lever les yeux au ciel, nous souhaitons rappeler que ce calcul n’a rien de théorique.

 

On l’utilise désormais chaque année afin d’indiquer le « jour du dépassement de la Terre », celui à partir duquel l’humanité vit à crédit au regard des ressources naturelles que nous consommons tous les jours. Le même effort pédagogique doit être réalisé pour marquer le jour à partir duquel notre société choisit de vivre collectivement à crédit vis-à-vis des femmes. Les conséquences de ce déséquilibre social et économique sont nombreuses et graves.

Les inégalités persistent et leurs conséquences sont lourdes

Cette discrimination touche l’ensemble de la société, y compris les plus diplômées. L’an passé, la Conférence des grandes écoles a encore rappelé que « les inégalités d’emploi et de salaire entre les femmes et les hommes se creusent dès la sortie de l’école, et ce quelle que soit la filière. En effet, le taux net d’emploi, la part de contrats à durée déterminée, l’accès au statut de cadre, et le niveau de salaire brut annuel moyen (avec ou sans prime) sont autant d’indicateurs qui témoignent d’un accès à l’emploi genré ». Est-ce vraiment acceptable en 2022 ?

 

À l’heure où les débats sur les retraites sont vifs, il est important d’y associer le poids de ces inégalités. Avec des salaires plus faibles tout au long de leur chemin professionnel et une plus grande espérance de vie, les femmes courent aussi le risque d’une plus grande précarité au terme de leur carrière.

 

Nous disposons désormais de nombreux indicateurs et notamment de l’Index de l’égalité professionnelle créé en 2018, dont l’édition 2022 nous a appris que seules 2% des entreprises ont obtenu la note maximale. Seules 27% des entreprises respectaient une parité ou quasi-parité dans les 10 meilleures rémunérations. Nous ne voulons pas de ce modèle de société, nous ne voulons pas de changements qui interviennent à une échelle de temps, qui n’est pas la nôtre !

Les salaires plus faibles des femmes sont un frein à l’entrepreneuriat

L’écart de patrimoine entre sexes s’explique en premier par celui des revenus, selon ce que montrent les résultats des travaux de l’Institut national des études démographiques. Les différences salariales que rien ne justifie se répercutent donc sur la capacité à épargner des femmes… donc sur les leviers concrets dont elles pourraient disposer pour entreprendre et vivre la vie qu’elles entendent.

 

Dans les pays en développement, auxquels nous ne pensons pourtant pas avoir à nous comparer, le microcrédit a bénéficié d’abord aux femmes. Parce qu’elles sont davantage touchées par la pauvreté que les hommes et qu’elles ont moins accès aux services bancaires, d’une part, et aussi parce qu’elles sont beaucoup plus fiables quand il s’agit de rembourser, d’autre part… Cette réalité vient nourrir nos constats et notre volonté d’agir en France.

Un nouvel outil pour favoriser l’entrepreneuriat féminin

Lancer un projet d’entreprise, créer son outil de travail avec un capital trop faible, inférieur à celui des hommes, engendre un risque d’échec plus grand. Trop souvent les entrepreneures ont accès à des financements moins importants que les entrepreneurs masculins à raison de ces inégalités de départ. La garantie « Égalité femmes » est aujourd’hui le seul dispositif public de financement spécifiquement destiné à soutenir l’entrepreneuriat des femmes.

 

Il faut désormais aller plus loin. Le Canada l’a compris en créant un « Fonds de prêt pour les femmes en entrepreneuriat ». Nous pensons qu’en France également, il faut ouvrir aux femmes des dispositifs d’accompagnement financiers spécifiques. C’est pourquoi WILLA appelle le gouvernement à soutenir les entrepreneures au démarrage de leur activité, là où l’accès au financement est rendu plus difficile par un faible capital de départ. Nous préconisons le déploiement d’une enveloppe budgétaire allant jusqu’à 30 000€ par femme souhaitant se lancer dans la création d’entreprise.

 

Cette mesure compensatoire ne pourra pas, seule, pallier la totalité des inégalités professionnelles qui persistent entre les genres. Une exemplarité en matière d’égalité appelle une mobilisation de l’ensemble des acteurs de l’économie pour sensibiliser et former les femmes et les hommes aux enjeux de la création, de circulation et donc de la meilleure répartition des richesses.

Marie Georges, Présidente de WILLA,
Sarah Huisman-Coridian et Marie-Virginie Klein, Vice-Présidentes de WILLA,
Flore Egnell, Déléguée Générale de WILLA.

 

 

 

 

 

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