Les femmes, sur le banc de touche dans le monde du sport ?

Les femmes,

sur le banc de touche

dans le monde du sport ?  

Dans leur pratique quotidienne ou en compétition sportive, les femmes peinent encore à s’épanouir complètement dans un milieu qui leur reproche leur féminité, trop souvent associée à la maternité, ou leur masculinité, trop loin de l’image que la société aime à leur donner.

Leurs capacités physiques, l’intérêt du public pour les voir en compétition et plus globalement leur légitimité sont constamment remises en question et leur présence dans le monde du sport n’évolue que très progressivement.

Pourquoi les femmes sont-elles encore tant considérées comme des outsiders dans le monde du sport, quand celui-ci est censé rassembler, fédérer et abaisser les barrières sociales, culturelles et géographiques ? Comment lutter contre ces inégalités ?

 

Pourquoi les femmes sont-elles considérées comme des outsiders du sport ?

 

Force, endurance, combativité… Traditionnellement, les valeurs du sport sont considérées comme masculines. Lorsqu’on est une femme, pas question de transpirer, d’être musclée, d’avoir des épaules plus large qu’un homme, ce n’est pas féminin… La société entière s’est construite autour de cette idée. À titre d’exemple, les vêtements ont été pensés pour faciliter l’agilité, le mouvement chez les hommes, quand ils doivent avant tout être élégants pour les femmes. Les robes, les jupes, les corsets ont éloigné prématurément la possibilité pour les femmes de s’adonner à une pratique sportive. Progressivement, ces effets de mode ont genré les différents sports : la danse et les sports artistiques pour les femmes, les sports collectifs et en extérieur pour les hommes.

On retrouve ces biais encore aujourd’hui dans les tenues autorisées en compétition : Le règlement de la Fédération internationale de handbal (IHF) précise que « les joueuses doivent porter des bas de bikini […] ajustés et échancrés ». Pire, en juillet 2021, les joueuses de l’équipe norvégienne féminine de beach handball ont été sanctionnées pour avoir refusé de jouer en bikini et porté des shorts à la place. On peut penser aussi à Serena Williams, dont la combinaison noire à ceinture rouge sur les courts de Rolland Garros, avait été très critiquée en 2018. Une combinaison jugée complètement en dehors des codes d’esthétique du tournoi, mais qui permettait à la joueuse de pratiquer son sport sereinement, sans craindre pour sa santé, après un accouchement dont elle se remettait difficilement.

Tant d’exemples pour un seul constat : même au plus haut niveau de compétition sportive, les femmes sont constamment ramenées à leur corps et ce qu’il doit renvoyer. Malheureusement, les inégalités dans le monde du sport ne se concentrent pas que sur l’apparence et les tenues autorisées des sportives, la place des femmes dans cet univers est encore questionnée sur de nombreux aspects :

 

    • Le sport féminin est sous-médiatisé : En 2016, les compétitions féminines ne représentent que 16 à 20% du temps de diffusion par les régies des médias sportifs selon une étude du CSA.

 

    • L’inégalité salariale n’épargne pas le milieu du sport : Les joueuses de Ligue Féminine de Basketball touchent en moyenne 3,3 fois moins que leurs homologues masculins. Pour le football, les chiffres sont encore plus frappants, puisqu’une joueuse de première division touche 2 500 euros environ, soit 37 fois moins qu’un joueur de Ligue 1.

 

    • Les femmes sont absentes des instances dirigeantes : On compte seulement 18 femmes à la tête des 113 fédérations sportives en France, pour 95 hommes, en 2021.1

 

 

Le sport, un puissant outil en faveur de l’égalité.

 

L’égalité des genres est encore loin d’être acquise dans le monde du sport et cela a des répercussions directes sur la pratique sportive des femmes. Seules 16% des femmes pratiquent un sport en compétition, contre 31% des hommes. 45% des femmes abandonnent le sport en club entre 14 et 20 ans, contre seulement 35% des hommes2 et 26% d’entre elles ne reprendront jamais d’activité sportive3. Des conséquences lourdes, quand on sait à quel point le sport est facteur d’insertion sociale, d’éducation, d’empowerment et de bien-être.

Le sport a un puissant impact sur la société, il est une institution qui transmet des valeurs fortes de respect et de vivre-ensemble, de dépassement de soi et d’engagement. Les associations sportives sont de véritables instances de socialisation, elles démocratisent la pratique et sont le lieu de rencontre de toutes générations, origines et milieux sociaux. Les évènements comme les tournois internationaux ou les Jeux Olympiques rassemblent des fans aux quatre coins de la planète sans distinction de genre, d’origine, d’âge et font retentir les valeurs de fraternité avec une efficacité particulière.

Un retentissement dont les organisateurs pourraient profiter pour faire bouger les lignes, pour mobiliser et changer les mentalités. Plus largement, c’est tout un écosystème qui pourrait se saisir de ces enjeux et évoluer vers plus de diversité, d’inclusion pour que chacun.e puisse s’épanouir dans sa pratique. Le sport pourrait être un levier incroyable pour porter la cause des femmes, en bousculant les représentations traditionnelles, en proposant des rôles modèles pour les nouvelles générations, en véhiculant de nouvelles valeurs d‘inclusion, d’équité et de mixité.

Les récents bouleversements liés au Covid-19 et à la distanciation sociale ont montré qu’il était possible de faire évoluer très rapidement les pratiques sportives, notamment grâce à l’innovation technologique.

 

Les femmes dans la SporTech : bientôt la fin de la triple peine ?

 

Plateformes de cours vidéos, entraînements respectueux des gestes barrières, développement du ski de randonnée pour répondre à la fermeture des remontées mécaniques… Le monde du sport a prouvé qu’il peut évoluer rapidement et sous la contrainte, grâce à des instances proactives.

Le sport de demain est en construction, la tech se diffuse de plus en plus dans les pratiques amatrices et professionnelles des sportif.ve.s : équipements connectés, suivi des performances par des applications et algorithmes pour établir son programme d’entraînement… Des innovations encore jusqu’à présent pensées par et pour des hommes. Les équipements, algorithmes et outils mainstream ont pour la grande majorité été conçus pour s’adapter aux métabolismes et physionomies masculines, sans prises en comptes des particularités des pratiques des femmes, de leur biologie et de leurs morphologies.

Le marché prend tout juste la mesure de cet angle mort et de nombreux acteurs de l’écosystème changent doucement de posture : Nike et son spot publicitaire du Superbowl, Adidas et l’expansion de sa gamme de brassières pour s’adapter à tous les corps féminins, le Prix « Performances pour elles » de la FDJ pour soutenir les projets visant à améliorer la haute performance féminine… Le sport opère enfin une mue vers plus de mixité !

Pour que ces premiers pas vers plus d’inclusion ne virent pas en 4purple-whashing***, il est primordial que les femmes soient à l’avant-garde des prochaines innovations sportives, pour être en mesure de répondre à leurs besoins et garantir l’objectivité des futures technologies qui feront le sport de demain.

Plus de femmes dans la sportech et dans l’écosystème sport en général, c’est un premier pas pour encourager la pratique sportive par les femmes. Un premier pas, pour encourager les femmes à oser, occuper l’espace, assumer leur force, leur détermination et leur ambition, sur le terrain comme dans la société au sens plus large !

 

 

1Ministère de la Ville, de la Jeunesse et des Sports, 2014

2Conseil de l’Europe, **« Égalité femmes-hommes », Manuel de bonnes pratiques, n°2, 2011

3Europe 1, La parité dans les instances dirigeantes

4Le PurpleWashing ou Féminisme-Washing est le fait d’utiliser la cause féministe, pour faire du profit et donner une (fausse) image engagée à l’entreprise, on en reparlera !